Le 24 novembre, Les Echos ont publié un article sur les placements éthique, dont fait partie le GFI.
Jean-Yves HENRY, directeur général d’EPICUREAM, a répondu aux questions d’Emmanuel SCHAFROTH concernant EPIFORÊT 1.
Vous pouvez retrouver cet article sur le site des Echos (attention, il est réservé aux abonnés !) ou le lire dans son intégralité ci-dessous.
Transcription de l’article
Les Echos le 24 novembre 2022, rubriques « Patrimoine » et « Placements »
Epargne : 3 idées de placements éthiques
Dans la jungle des produits financiers, l’investisseur moralement exigeant peut trouver des solutions pour mettre son portefeuille en harmonie avec ses valeurs. Repères et conseils que ses placements soient en adéquation avec ses idées.
Comment définir précisément la notion de finance éthique ? Pour reprendre la définition proposée par l’Académie française, l’éthique renvoie à une notion morale, aux « conduites humaines et aux valeurs qui les fondent ». A chacun son éthique, donc ?
Disons que chaque individu cultive sa vision propre de ce qu’il est juste de faire et peut ainsi orienter ses placements financiers différemment, en fonction de sa préoccupation première. Voici trois exemples d’objectifs qui peuvent correspondre à une vision éthique et se traduisent très concrètement en investissements.
1. Favoriser l’emploi en France
Après l’ère de la mondialisation galopante s’ouvre une période économique vouée à une certaine relocalisation. Les investisseurs peuvent surfer sur ce thème grâce à des fonds actions sélectionnant les entreprises sur le critère de la création d’emplois en France. C’est le cas du fonds Insertion Emplois Dynamique (Mirova), un véhicule créé en 1994 mais dont la gestion a été repensée récemment.
Le fonds investit majoritairement dans des actions françaises, mais intègre aussi des sociétés étrangères ayant une présence significative en France. La poche cotée est ainsi gérée d’une manière cohérente avec la poche non cotée (5 % à 10 % du fonds), qui vise depuis l’origine à financer des entreprises solidaires ayant vocation à la réinsertion par l’emploi, d’où la dénomination du fonds.
Récemment, une flopée d’autres fonds se sont lancés sur une même thématique. Talence Humpact Emploi France (Talence Gestion), BFT France Emploi ISR (BFT IM) et Palatine France Emploi Durable (Palatine AM), ces trois fonds actions France ont un point commun. Ils se fondent sur la méthodologie du cabinet Humpact, spécialisé dans les données sociales, qui note les 280 plus grandes entreprises françaises cotées sur leur création d’emploi globale, mais aussi plus spécifiquement l’emploi de certains publics(jeunes, seniors, handicapés), la parité femmes-hommes ou la qualité des emplois.
Sycomore Inclusive Jobs (Sycomore AM) est un fonds actions européennes ayant une approche similaire, fondée sur la méthodologie The Good Jobs Rating. Comme le fonds de Mirova déjà cité, il a une poche solidaire, ce qui lui vaut d’avoir reçu le label Finansol.
2. Prêter à des TPE
En tant qu’épargnant, on peut se poser la question de l’utilité d’investir son argent dans des actions de grandes sociétés internationales. Après tout, elles ont accès à tant de possibilités de financement qu’elles n’ont pas besoin de vous. C’est tout l’inverse des très petites entreprises (TPE), qui ont parfois un accès limité au financement bancaire, surtout avec la remontée des taux d’intérêt, ou sont rebutées par la complexité des procédures.
Précisément, tout un chacun peut aider ce type d’entreprises en leur prêtant de l’argent par le biais des plateformes de crowdfunding. On ne parle pas ici des plateformes spécialisées dans le financement immobilier, mais de sites plus généralistes, comme October, Prexem, Les Entreprêteurs ou Vatel Direct.
Pour des montants unitaires très faibles (le minimum à investir se mesure en dizaine d’euros), les épargnants vont pouvoir contribuer à des prêts qui peuvent être souscrits par des PME industrielles, mais aussi par des entreprises de bien plus petite taille (restaurants, artisans, boulangeries, détaillants, etc.) qui ont besoin de réaliser des travaux d’aménagement ou de financer un stock. Une façon de donner un coup de pouce à des acteurs aux moyens limités.
3. Contribuer à la reforestation
La forêt fait partie des domaines reconnus comme éco-activités par le label Greenfin. Acheter de la forêt sans avoir à la gérer soi-même, c’est possible, grâce aux groupements forestiers d’investissement (GFI), apparus après la transposition en droit français de la directive européenne AIFM sur les fonds alternatifs il y a une dizaine d’années. « C’est la SCPI de la forêt », résume Jean-Yves Henry, directeur général d’EPICUREAM, qui a lancé en 2021 son GFI.
Les épargnants peuvent ainsi investir dans des actifs forestiers à partir d’un seuil relativement modeste (6.000 euros, soit 30 parts), la durée de détention conseillée étant au minimum de dix ans. Cet outil est intéressant pour ce qui est de la transmission, 75 % de la valeur d’une forêt étant exonérés de droits de succession. « Un quart de nos investissements forestiers porteront sur des actifs à transformer, par exemple par le changement des essences », poursuit Jean-Yves Henry.
Ici, EPICUREAM entend bénéficier du label Bas-Carbone, qui permettra de financer les travaux de transformation grâce à des crédits carbone acquis volontairement par des entreprises. La reforestation permet, en effet, de justifier d’une contribution à la lutte contre le changement climatique par la création d’un « piège à carbone ».
Le fonds Pictet Timber (Pictet AM) est un autre moyen d’investir dans la forêt par l’intermédiaire de sociétés cotées de la filière du bois et du papier. Leur activité les conduit à détenir en propre des forêts ou à s’assurer un approvisionnement durable en bois. Cette stratégie a typiquement un bêta élevé, c’est-à-dire que les performances ont tendance à amplifier les variations du marché boursier.
Le fonds, essentiellement investi en Amérique du Nord et en Europe du Nord, a donc été chahuté cette année et pourrait l’être encore. Mais l’investisseur peut se targuer, en y mettant son argent, de générer une empreinte carbone négative (ce qui est très positif du point de vue environnemental). Un produit atypique dans l’industrie de la gestion.
Et si vous souhaitez investir de manière plus symbolique, pourquoi ne pas acheter quelques arbres, au lieu d’une forêt entière ? C’est possible grâce à la plateforme EcoTree, où vous pouvez acquérir individuellement, à partir de 15 euros, des arbres géolocalisés et identifiés par leur essence et leur horizon de coupe dans des forêts gérées par cet opérateur. Un placement de très long terme, dont la plus-value n’est attendue qu’au moment où le bois sera cédé, ce qui se chiffre le plus souvent en décennies. Un placement hautement symbolique de ce qu’est le long terme.
Comprendre les labels de qualité
Il n’existe pas à proprement parler de label de la gestion éthique. Le label ISR français récompense les produits démontrant qu’ils prennent en compte les aspects sociaux et environnementaux dans leur stratégie de gestion. Son attribution à 1.074 fonds totalisant 658 milliards d’euros d’encours témoigne d’un réel succès, mais il est aussi critiqué pour son côté trop souple. Pour schématiser, il s’agit de vérifier des processus de gestion, sans se poser la question de la destination des fonds.
Au contraire, le label Greenfin est reconnu pour son intransigeance, avec des critères stricts sur la destination de l’argent géré par les 92 fonds labellisés : il doit être investi majoritairement dans des éco-activités référencées (énergies renouvelables, transport propre, etc.) et exclure totalement les énergies fossiles et le nucléaire. Les conditions du label Greenfin pourraient ainsi se retrouver en contradiction avec la taxonomie verte, répertoire des activités vertes lancé à l’échelle européenne, qui devrait, elle, inclure le nucléaire. Là encore, chaque investisseur peut se poser la question : faut-il financer uniquement les énergies renouvelables incapables de répondre à l’intégralité de nos besoins dans un avenir proche ou pousser les feux sur le nucléaire, autre énergie décarbonée ?
Enfin, le label Finansol récompense les produits d’épargne utilisant un mécanisme solidaire. Soit une partie des fonds est affectée au financement d’entreprises solidaire d’utilité sociale (ESUS), soit le produit financier reverse une partie de ses revenus à des associations. Contrairement aux deux labels cités précédemment, celui-ci n’est pas placé sous la responsabilité des pouvoirs publics, mais d’un acteur associatif (Fair).
Emmanuel SCHAFROTH